Originaire d'Aix-en-Provence, Hugues Ripert s'est familiarisé avec les modèles réduits dès son enfance. D'autant plus que “mes parents animaient une petite entreprise de modélisme, qui s’appelait Record. J’ai grandi dans le monde de la miniature. Mes parents ont cessé leur activité lorsque j’avais 15 ans“, explique-t-il. “A l’âge de 20 ans, j’ai fait un stage en entreprise au Portugal, chez Vitesse, la marque de modélisme de Bernard Pérès, qui s’y était installé . A l‘issue de ce stage, en 1994, on m’a proposé un travail en Chine pour faire du suivi de production. Aixois de souche, je ne pensais jamais en partir, étant très attaché au pays“. Depuis, je rentre régulièrement en France, pour des périodes d'une semaine à deux mois". Hughes Ripert et son épouse hong-kongaise Shirley ont deux fils, Alister et Nicolas.
Après Vitesse, aujourd'hui marque disparue, Hugues Ripert a oeuvré pour les marques Quartzo et Ixo, pour qui il était en charge de la recherche et du développement des modèles. En 1998, alors qu'il travaillait encore pour Ixo, il lança Mininax, sa propre société. Dans un premier temps elle était vouée à produire au nom de sa marque Spark des miniatures de voitures des 24 Heures du Mans n'étant pas en haut de la hiérarchie, mais que ne traitaient pas les grands fabricants comme Minichamps et Ixo. "Le nom de Spark m'est venu un soir en cherchant quelque chose de court et de dynamique, qui ait un rapport avec le sport auto“, se souvient Hughes.
"Nous avons commencé par un petit atelier de maquettistes de dix personnes sur Zhuhai, parce que la construction des Spark était très différente de ce qui se faisait à l’époque. Puis très vite on a lancé une petite unité de production pour pouvoir fabriquer nous-mêmes. Ensuite c’est allé relativement vite pour intégrer tous les métiers qui touchent au développement et à la production des miniatures. Aujourd’hui notre force est d’avoir tout intégré. La production de A à Z, y compris tout le développement, les moules, la recherche, le traitement de fichiers, les scanners, l'impression de nos propres décalques. Evidemment, nous achetons des matières premières et des petites fournitures, mais au niveau des “process“ on a tout intégré. Cela nous donne un gros avantage.“ Des moulages initiaux des corps de carrosseries en résine, Spark a ainsi migré vers ses propres moulages par injection de coulée Zamak.
“Nous avons trois unités de productions et nous sommes en tout 1200 personnes. Ici à Sanxiang (près de Zhuhai), c’est l’unité principale qui emploie 700 personnes et dont la directrice est Cecilia Kau, et où nous faisons tout le développement. Nous avons une autre unité de production de l’autre côté du village, qui fabrique des gammes différentes et des quantités plus importantes et emploie 250 personnes, et une autre unité à 800 km d’ici plus au nord, dans le Hunan, qui ne fait que de la production avec 250 personnes.
En France, on a une société de diffusion à Meyrargues (Bouches-du-Rhône) qui s’appelle Mix Diffusion, et qui dessert le sud de l’Europe. Nous avons monté deux autres bureaux de distribution en Allemagne et pour le Japon. Ce qui représente 80% du réseau traditionnel. En plus des trois bureaux en Europe, nous avons deux autres à Hong Kong et à Macao.
En plus de notre marque Spark, nous fabriquons pour d’autres marques, et également pour de nombreux constructeurs automobiles. Le plus important est le groupe Volkswagen, nous travaillons beaucoup pour Porsche, Audi et VW. Nous sommes fournisseurs officiels, surtout pour les voitures de compétition.
En matière de formats, nous sommes très flexibles. Cela va du 1/87e jusqu’au 1/8e, même si l’échelle de 1/43e reste la plus importante. Nous sommes flexibles aussi bien pour la taille, les quantités et les gammes de prix. Aujourd’hui nous arrivons quasiment à répondre à toutes les demandes. Notre gamme est très large, ça va de la moto à la Formule 1, aux anciennes en passant par le rallye ou les voitures de route. On touche à peu près tous les sujets. La spécialité est de faire des voitures, mais de temps en temps, on a des demandes pour faire un casque, un moteur, un bateau ou un avion. Cela reste très marginal, car 99 % des projets restent des voitures“.
Spark est en pleine période d'expansion. “On n’a jamais cessé d’évoluer. Nous sommes bien équipés, mais pour préparer l’avenir, nous sommes en train de développer une autre unité de production, mais celle-ci n'est pas en Asie.
Cela fait aussi plus de 5 ans que nous travaillons aussi avec la presse. Nous fournissons des miniatures pour de grands groupes de presse comme De Agostini, Altaya et Planeta. Les collections presse sont importantes, car elles passent dans des pubs TV ou des campagnes de presse, et font des volumes très conséquents.
Et depuis très peu nous avons lancé notre propre collection sous la marque Spark. Notre première est une collection de casques de pilotes de F1. Elle a été lancée en Argentine en Octobre 2017. Il y a encore beaucoup à faire dans ce domaine"...
“Reni, c’est une anagramme de Rien ! Je suis né le 18 avril 1950, celui de la Saint-Parfait. Donc ça donne rien n’est parfait !“, lance cet expatrié de 68 ans adepte de la boutade et de l'autodérision. "Et tout le monde m’appelle Luigi, parce que mon père était italien. Je suis un soixante-huitard dans l’âme, j’avais 18 ans en 68. J’ai habité à Rumilly, en Haute-Savoie. Une ville qui voulait dire Rallye du Mont-Blanc. Mon éveil pour le sport automobile a commencé lorsque j'allais voir la nuit les spéciales du rallye. A cette période, je parlais déjà l’italien et l’anglais. En étant proche de Genève, on avait déjà accès au Salon Auto et aux revues étrangères. Via ma famille italienne, on me ramenait Autosprint et Auto Italiana. Donc j’ai toujours eu une ouverture sur le sport auto un peu plus large que l’anglophilie de Monsieur Crombac“ (l’historique rédacteur-en-chef de Sport Auto. Ndlr.).
Etant issue d’une famille appartenant à une bourgeoisie relativement aisée, j’ai donc pu me déplacer sur les courses assez facilement, explique Luigi. En 1970, comme mon père était ami avec la famille propriétaire de Candy (fabricant d’électro-ménager) et représentait la marque sur Paris, on m’a envoyé travailler à l’usine de cette marque italienne, qui était située … à Monza. J’y passais donc mes week-ends et j’ai continué à graviter autour de l'Autodromo. Connaissant les produits à vendre ainsi que le sport auto, je me suis ainsi retrouvé à “grenouiller“ dans le milieu de la F1, au moment où les Tyrrell portaient les couleurs Candy. J’ai assisté à tous les Grand Prix européens en 79. Etant déjà maquettiste, c’est à cette époque que j’ai rencontré Christian Moity et Jean-Marc Tesseidre (qui entre autres étaient les auteurs de l'annuel des 24 Heures du Mans. Ndlr.). J’ai toujours été partisan des Moity, et Christian avait une écriture particulière. Mon parcours atypique, et c’est comme ça que je suis resté dans le sport auto.
J’ai continué mon métier de technicien en électro-ménager, ce qui me donnait une certaine liberté, et Jean-Marc m’a très vite “embarqué“ aux 24 Heures du Mans afin de lui donner un coup de main pour le modèle réduit. Je me suis retrouvé à faire des piges. J’ai travaillé sur les trois tomes de leur livre sur l’Endurance. J’habitais à Paris, j’avais du temps de libre, j’avais de la mémoire et j’étais trilingue. Maintenant on peut dire que je suis quadrilingue car je me débrouille pour parler en chinois et je le lis un peu. Le plus difficile, pour nous européens, ce sont les tonalités. Par exemple, pour dire vendre et acheter, qui se dit à peu près pareil, c’est impossible à différencier. Par contre, en écriture, je sais les reconnaître. L’écriture chinoise est logique : quand tu vends, tu mets un signe de plus, parce que c’est plus cher.
Comment ai-je atterri ici ? En fait c’est Tesseidre qui m’a recommandé à Hugues.
Pour travailler avec Christian Moity et Jean-Marc Tesseidre, il ne fallait pas être mou et savoir composer. Il y a plus de 20 ans qu’au Mans j’assure la permanence pendant la nuit. Cela me permet de de connaître et de garder des relations avec beaucoup de gens, qui savent que quand ils m’envoient des photos, elle ne se perdent pas. J’ai toujours beaucoup défendu les photographes et j’ai énormément de documents photos. Les Moity, Christian et Etienne, m’ont transmis des milliers de diapositives, surtout des années 70. Mais ici ça reste à usage interne, je ne les diffuse pas. Nous n’avons pas à diffuser ce qui ne nous appartient pas. En plus, étant fils de gens aisés, j’ai un peu d’irrespect par rapport aux gens établis. Je suis “ingérable“, mais j’ai de grosses compétences, une connaissance et une mémoire !
Parfois, pour le boulot, on s’aperçoit que l’on tourne en rond. Il y a des voitures qui sont très difficiles à reproduire et à décorer. Dès que c’est exotique, c’est relativement plus facile. Toutes les GT des années 70, …
Par exemple, je viens de travailler sur les cinq Porsche RS 718 du Mans 59. Aucune n’a terminé la course. Alors il a fallu déterminer les photos des essais, de la course … Par contre, à l'inverse, je n’ai pas eu de difficulté pour les Alfa Romeo d’avant-guerre. C’est vraiment un travail d’archives sur chaque projet. J’ai certaines photos datant de quarante ans, je ne peux même plus dire quelles sont les sources. Tout est chez moi dans l’appartement, elles ne sont pas ici à l’usine.
Avant de venir ici, j’ai fait chômeur pendant trois ans, tout en travaillant comme pigiste. Je suis arrivé à Sanxiang en 2007, au lendemain des 24 Heures du Mans. Ici, dans la bourgade, il y a plus de 200 000 habitants. Quand je suis arrivé ici et que j’ai vu le prix de l’immobilier, ça n’a pas trainé et j’ai vite acheté. Depuis, cela a plus que triplé. A Zhuhai ou Zhongshan (la ville principale du district duquel dépend Sanxiang. Ndlr.), c’est inabordable. L’Asie d’ici me fait penser à la Californie de ma jeunesse“.
Jean-Luc Taillade
Photos © Jean-Luc Taillade